SEXISME - “J’ai eu le sentiment de découvrir le poids du sexisme en arrivant dans les sphères de pouvoir, ou en tous cas en les côtoyant”, raconte Gabrielle Siry-Houari. Dans son livre “La République des hommes” (éditions Bouquins), la maire-adjointe du 18e arrondissement de Paris et porte-parole du PS dénonce ce qu’elle appelle le “patriarcat libéral”.
“C’était d’une certaine manière un choc, surtout dans le milieu médiatique. L’impression de tomber de haut, raconte-elle. J’ai le sentiment qu’il y a une espèce d’attente - qui est tout à fait légitime - de ces sphères de pouvoir pour qu’elles soient exemplaires et qu’en fait c’est l’inverse qui se produit.”
Son récit démarre en 2015 à Bercy. Elle intègre le Ministère de l’Économie et des Finances comme conseillère au secrétariat d’État au numérique et à l’innovation. Mais la difficulté principale, selon ce qu’elle décrit, c’est le sexisme ordinaire. Elle a alors 25 ans, 90% de ses interlocuteurs sont des hommes. Son quotidien est alors ponctué de “manterrupting” et de dénigrement des hommes qui composent son entourage professionnel.
“Si le sexisme continue de sévir dans les sphères de pouvoir où se prennent les décisions pour notre vivre-ensemble, où s’élaborent les lois et s’organise le débat au sein de l’espace public dans les médias, il y a moins de chances que la situation de l’ensemble des femmes s’améliore, regrette-t-elle. Même constat sur les violences: comment escompter une lutte appropriée contre les violences sexuelles si ceux qui les commettent composent aussi les sphères de pouvoir?”
Ce sexisme lié au pouvoir, elle le retrouve lorsqu’elle se rend sur certains plateaux télé. Elle consacre un chapitre de son livre à la responsabilité de certains médias dans “l’hystérisation” du débat public. Elle est devenue porte-parole du PS et se souvient très bien de ses différents passages sur CNews et en particulier dans l’émission de Pascal Praud, “L’heure des pros”.
“Un troupeau d’hommes sexagénaires et fortunés”
À plusieurs reprises, elle tentera de défendre son propos, sans succès. “La première fois, j’y ai subi les tentatives d’infantilisation de Frédéric Mitterrand qui mimait l’émerveillement devant mon joli cahier”, raconte-t-elle (voir la vidéo ci-dessus). Avant d’y noter “vous êtes exquise” et son numéro de téléphone et de s’en vanter en direct.
“Vous êtes tout de suite infériorisée et ensuite c’est plus difficile, il faut déployer beaucoup plus d’efforts, pour avoir une parole politique crédible et forte, explique-t-elle au HuffPost. Et on comprend qu’en fait, vous n’êtes pas là pour ça.”
Mais c’est surtout le sexisme et le paternalisme de Pascal Praud qui la décidèrent à boycotter l’émission et même la chaîne. “Ces émissions, très organisées, bien qu’elles s’apparentent à une foire d’empoigne, s’assimilent donc à une arène dans laquelle une femme - parfois un homme, aux opinions ou à la sociologie minoritaires - est jetée en pâture à un troupeau d’hommes sexagénaires et fortunés” décrit-elle.
Des matchs “perdus d’avance” qu’elle a désormais décidé de boycotter. “On ne gagne pas grand chose et au contraire, on contribue à légitimer ce genre d’espace médiatique problématique, qui n’est pas un espace de débat neutre”, conclut-elle.
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