BÉLARUS - Le régime de Alexandre Loukachenko vient-il de sombrer dans le “terrorisme d’État”, pour reprendre les mots sans équivoque du premier ministre polonais? Lundi 24 mai, la communauté internationale ne mâche pas ses mots pour dénoncer la dernière dictature aux porte de l’Europe, après le détournement d’un avion de ligne de la compagnie RyanAir à bord duquel se trouvait un militant de l’opposition.
Dimanche 23 mai, un Boeing 737-800 devant assurer la liaison Athènes-Vilnius a été intercepté par un chasseur bélarusse, puis contraint de se poser à Minsk, officiellement en raison d’une “alerte à la bombe”. En début de soirée, l’appareil a finalement pu reprendre son vol à destination de la Lituanie, mais sans un passager bien connu des autorités de l’ancienne république soviétique.
Selon plusieurs témoins présents dans l’avion détourné, il s’agit de Roman Protassevitch, 26 ans, un ancien rédacteur en chef de l’influent média d’opposition bélarusse Nexta. Le jeune homme a été arrêté après l’atterrissage forcé à Minsk.
“Il encoure la peine de mort”
Roman Protassevitch, qui habite en Pologne depuis 2019, aurait tout de suite compris ce qui l’attendait à son arrivée dans son pays d’origine. “Il ne criait pas, mais c’était visible qu’il avait très peur. On aurait dit que si le hublot avait été ouvert, il aurait sauté”, a témoigné Edvinas Dimsa, un passager. “Il s’est juste tourné vers les gens et a dit qu’il risquait la peine de mort”, a raconté une autre personne à bord, Monika Simkiene.
Il y a une dizaine de jours, Roman Protassevitch avait accompagné l’opposante et ex-candidate à la présidentielle Sviatlana Tikhanovskaïa pour une visite officielle en Grèce, selon le journaliste franco-bélarusse Andreï Vaitovich.
Il y a 10 jours, la leader démocratique du #Bélarus Sviatlana @Tsihanouskaya était en visite officielle en Grèce. Raman Pratasevich l'accompagnait en tant que photographe. Hier le régime de Loukachenko a décidé de détourner le vol #FR4978 afin de l'enlever.
— Andreï VAITOVICH (@andreivaitovich) May 24, 2021
CC @franakviacorkapic.twitter.com/eyK1BUWkKE
Sur Twitter, Sviatlana Tsikhanouskaya explique que Roman Protassevitch “encoure la peine de mort” pour avoir “activement couvert les événements des élections de 2020 et les protestations qui ont suivi”. “Les forces de sécurité ont lancé plusieurs affaires criminelles contre lui”, ajoute-t-elle.
En novembre, les services de sécurité bélarusses (KGB), hérités de la période soviétique, avaient inscrit le nom Roman Protassevitch et celui du fondateur de Nexta, Stepan Poutilo, sur la liste des “individus impliqués dans des activités terroristes”. Nexta a joué un rôle clé dans la vague de contestation de 2020 contre le président Loukachenko, qui occupe ces fonctions depuis 1994.
In 2019, he left Belarus due to cooperation with Nexta telegram channel, then became its editor. He actively covered the events of the 2020 elections & the subsequent protests. 🇧🇾 security forces started several criminal cases against him,🇧🇾 KGB put him on the list of terrorists.
— Sviatlana Tsikhanouskaya (@Tsihanouskaya) May 23, 2021
Lundi 24 mai, l’Université européenne des sciences humaines (EHU) a annoncé que Sofia Sapéga, l’une de ses étudiantes et compagne de Roman Protassevitch, a aussi été arrêtée lors du détournement, une information confirmée par le porte-parole du ministre lituanien des Affaires étrangères Gabrielius Landsbergis. Sofia Sapéga étudiait en Lituanie, où l’EHU a été contrainte de transférer ses activités par les autorités bélarusses, après avoir avoir été fondée en 1992 à Minsk.
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