L'allongement du congé paternité, "une avancée" mais "décevante"

FAMILLE - Le nouveau congé paternité -ou plutôt du second parent- de 28 jours dont une semaine obligatoire, entre en vigueur à partir de jeudi 1er juillet. Une réforme sociétale attendue de longue date qui vise à permettre aux pères de s’investir davantage dans la parentalité et la vie du foyer.

Dans le cas d’une naissance multiple, sept jours de congés sont ajoutés, soit 32 contre 18 actuellement. Niveau rémunération: les trois jours du congé de naissance restent à la charge de l’employeur, et les jours restants seront indemnisés par la Sécurité sociale.

Pour les associations de parents qui militent pour une plus grande égalité dans les congés parentaux, cette nouvelle mesure est une “avancée”, mais largement insuffisante. Interrogée sur la question lors d’une conférence de presse d’associations pour un “plan de relance féministe”, Claire Tran, co-fondatrice de Parents & Féministes, parle même d’un “coup de com’”.

“Seuls 7 jours sont obligatoires”

“C’est clairement décevant, car sur les 28 jours, seuls 7 sont obligatoires, explique-t-elle au micro du HuffPost dans la vidéo en tête d’article. Les pères veulent prendre ce congé, mais souvent, et selon les secteurs d’activité, n’osent pas le prendre, s’autocensurent, à l’égard de leur employeur, leur carrière, leur avancée dans l’entreprise.”

Optionnel, le congé paternité est actuellement pris par environ sept pères sur dix, un chiffre qui a peu évolué depuis son instauration en 2002 et dissimule de fortes inégalités sociales: 80% des salariés en CDI y ont recours, contre moins de 60% en CDD. C’est pourquoi la psychothérapeute Isabelle Filliozat, vice-présidente de la “Commission des 1000 premiers jours”, avait recommandé au gouvernement de porter ce congé à neuf semaines. 

“Les mères ont plus de deux mois de congé maternité, donc pourquoi est-ce que les pères n’auraient pas la même chose? demande Claire Tran. Les mères souffrent, sont en burn-out. Il y a entre 15 et 20% de dépressions post-partum en France, c’est un chiffre énorme.”

Comme le rappelle le collectif PAF (pour une Parentalité féministe) dans un thread publié à l’occasion de la fête des pères, “71% des tâches parentales sont encore assurées par la mère”. Une situation aggravée par la pandémie.

Réforme du congé parental

“L’allongement du congé paternité, c’est probablement mieux pour tisser un lien avec le bébé mais pas pour revoir la place de chacun au sein du foyer”, a confié Nadège Prager, du PAF, à l’AFP, qui plaide désormais pour un congé parental sur le modèle scandinave, bien rémunéré et réparti entre les parents.

Une réforme du congé parental qui est un enjeu majeur pour les associations de parents. “Ce congé parental doit être égalitaire, bien rémunéré, avec des droits d’accès pour le père non transférables à la mère, et des mesures d’incitation pour changer les mentalités” réclame le PAF. Des revendications partagée par Claire Tran, de Parents & Féministes. “Aujourd’hui, le congé parental est scandaleux en France. Il est rémunéré moins de 400 euros par mois, rappelle-t-elle. Il est pris majoritairement par les femmes, ce qui les précarise.”

Une étude publiée en avril dernier dévoilait que moins de 1% des pères prennent un congé parental à temps plein après la naissance de leur enfant, contre près de 14% pour les mères, constatent les auteurs de cette étude réalisée par l’Observatoire français des conjonctures économiques (OFCE, dépendant de Sciences Po Paris). Pour le PAF, ce congé bien rémunéré et partagé serait la “seule garantie pour lutter contre les inégalités femmes/hommes dans les sphères professionnelle, sociale et économique.”

Des évolutions pourraient intervenir à la rentrée, à l’issue d’une mission sur la conciliation des temps professionnel et familial menée depuis mars par Christel Heydemann, de Schneider Electric France, et le sociologue Julien Damon.

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