Se faire vacciner ou pas? Les 12-14 ans face à leur première décision de "grand"

Les occasions de prendre des décisions “de grand”, cela n’arrive pas tous les jours. Emy, Raphaëlle et Nicolas, trois jeunes adolescents ont un point commun qui surprend parfois leurs parents, à peine sortis de l’enfance, ils sont sûrs d’eux et de leurs choix, notamment sur la vaccination contre le Covid. Quitte, dans le cas de Nicolas, à s’opposer à ses parents. (Photo d'illustration)

VACCIN - Quand Raphaëlle, 13 ans, parle de la vaccination contre le Covid avec ses copains du collègue, ”ça part en cacahuètes”. Pour cette collégienne qui vit dans la Sarthe, la vaccination est une évidence. Pour Emy aussi, c’est évident. Mais dans l’autre sens. Pas question de se faire vacciner. 

Depuis le 15 juin, les 12-17 ans accompagnés d’un de leurs parents peuvent prendre rendez-vous et recevoir leurs deux injections (ou une seule s’ils ont eu le Covid) dans les centres de vaccination. Pour les plus jeunes de cette classe d’âge, les moins de 14 ans, le droit de vote est encore loin, la conduite accompagnée, s’ils en bénéficient n’arrivera pas avant plusieurs années et c’est tout juste le début de leurs choix d’orientation scolaire.

Autant dire que les occasions de prendre des décisions “de grand”, cela n’arrive pas tous les jours. Emy, Raphaëlle et Nicolas, trois jeunes adolescents ont un point commun qui surprend parfois leurs parents; à peine sortis de l’enfance, ils sont sûrs d’eux et de leurs choix. Quitte, dans le cas de Nicolas, à s’opposer à ses parents. 

“Je n’en ai pas beaucoup parlé avec mes parents”

“Je ne m’attendais pas à l’entendre en parler avec autant de sérieux et de conviction”, explique Marilyne après avoir écouté sa fille Emy répondre aux questions du HuffPost. Elle est auxiliaire de puériculture en région parisienne et par peur de ce qu’elle appelle le “manque de recul” sur le vaccin, elle a décidé de ne pas se faire vacciner. Le père d’Emy et sa nouvelle compagne, eux, sont vaccinés. Emy penche pour sa part du côté de sa mère. Elle assure s’être forgé son avis après de longues discussions avec ses amies. “Je n’en ai pas beaucoup parlé avec mes parents, mais surtout avec mes copines”, précise-t-elle.

Mère et fille en ont parlé une fois. “Je lui ai exposé le pour et le contre, explique Maryline. Je lui ai dit, ‘Maintenant tu es grande, tu fais ce que tu veux. Si tu veux te faire vacciner, je t’aiderai à prendre rendez-vous et je t’accompagnerai.’” Sa décision était prise et la jeune fille l’a annoncée à son père qui a aussi respecté son choix. 

L’arrivée du variant Delta, désormais quasi majoritaire en France, n’a rien changé à sa position, ni à celle de sa mère. “Je n’ai pas spécialement envie de me faire vacciner”, assure Emy simplement. Dans son entourage seule une de ses copines “est ok” pour se faire vacciner. Toutes les autres sont sur la même ligne qu’elle. 

“Avec le vaccin on va pouvoir se voir plus souvent”

Autour de Raphaëlle, au contraire, peu d’amis partagent son avis. “Quand on a fait un débat en classe, sur 28 élèves, j’étais la seule à voir des points positifs à la vaccination”, déplore-t-elle. Avec une amie, volontaire elle aussi pour se faire piquer, elles en ont parlé pendant une heure. “On a vraiment réfléchi aux points positifs et négatifs pour prendre notre décision”, développe la jeune collégienne.

Lorsqu’on interroge Emy et Raphaëlle sur les raisons qui ont poussé les autorités à ouvrir la vaccination aux 12 - 17 ans, bien que d’avis contraires, les deux jeunes filles semblent être aussi bien informées. Elles ont ainsi conscience que se faire vacciner, plus encore que les protéger elles des formes graves du Covid (qui touchent très peu les plus jeunes), aidera à protéger l’ensemble de la société. “Je le fais pour la bonne cause,  je le fais pour les autres”, précise Raphaëlle fière de cette démarche altruiste.

Ce mercredi 7 juillet, la jeune Sarthoise a reçu sa première injection. “Plus ça approchait, plus j’avais peur”, avoue-t-elle, notamment après les taquineries de son père qui lui promettait que l’aiguille toucherait l’os à cause de la finesse de ses bras. Mais, juste après l’injection, elle a pu rassurer sa copine qui se faisait vacciner deux jours plus tard. “J’ai un peu mal au bras, mais c’est tout, assure-t-elle. On l’appréhendait toutes les deux, mais on sait qu’avec le vaccin on va pouvoir se voir plus souvent et surtout on l’a fait pour protéger nos familles.”

Pour Nicolas, la question était courue d’avance. Au HuffPost, c’est son père qui rapporte la situation un brin conflictuelle dans laquelle la vaccination les a plongés. “Depuis toujours, il n’aime pas particulièrement aller chez le médecin”, commence Sébastien, éleveur de vaches laitières dans le Rhône. Avec sa femme, Sébastien a deux fils de 13 ans et 11 ans. En janvier, toute la famille a eu le Covid et dès que le couple a pu se faire vacciner ils ont sauté sur l’occasion.

“C’était une évidence de se faire vacciner pour nous , explique-t-il. Mais quand on en a parlé à Nicolas, il nous a dit ‘non’ d’emblée. Il a bien compris qu’on ne pouvait pas le forcer puisqu’on allait lui demander son consentement avant de piquer”.

“Vous ne pourrez pas m’obliger”

L’adolescent s’était préparé. “Une de nos voisines un peu plus âgée que lui, lui avait envoyé des documents sur le fait que les mineurs devaient donner leur autorisation. Il nous les a montrés et nous a dit ‘vous ne pourrez pas m’obliger’”, souligne le papa. Et Sébastien le sait bien, s’il va contre l’avis de son fils, ce dernier n’hésitera pas à expliciter son refus devant le médecin du centre de vaccination.

Le voilà coincé et bien embêté. Outre le fait que le jeune homme n’est vraiment pas à l’aise à l’idée de se faire piquer, Sébastien a compris que ce sont les discussions entre copains qui ont précipité la décision de son fils. “Au collège, ils en ont beaucoup discuté et Nicolas nous a dit que ce vaccin n’était pas efficace et qu’il n’était pas sûr”, déplore le papa. Le couple a bien essayé de “prendre de la hauteur”, de “faire de la pédagogie”, mais Nicolas n’a pas changé d’avis pour autant. “Je ne sais pas si à 13 ans, on a la hauteur d’esprit pour prendre ce genre de décisions”, se demande désormais Sébastien.

Et leur entourage n’aide pas. “Autour de nous, les autres parents ne sont pas précipités sur le vaccin pour eux comme pour leurs enfants. Nous sommes les seuls à l’avoir fait”, déplore-t-il. En attendant, le petit frère de Nicolas, lui, ne rêve que d’une chose, prendre la place de son grand frère et aller se faire vacciner. Désespéré de n’avoir que onze ans et de ne pouvoir accéder au précieux vaccin. 

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