Britney Spears: ce qu'il faut savoir sur l'affaire de sa tutelle

Des soutiens de Britney Spears lors d'un rassemblement #FreeBritney devant le Lincoln Memorial à Washington, le 14 juillet 2021

BRITNEY SPEARS - #FreeBritney. Le slogan inonde les réseaux sociaux et s’affiche sur les pancartes des rassemblements devant le Lincoln Memorial de Washington ou le tribunal de Los Angeles. Derrière lui, des dizaines de milliers de fans - anonymes ou célèbres - qui réclament que Britney Spears soit “libérée” de sa tutelle alors que la pop star de Toxic est placée sous ce régime judiciaire depuis 2008.

Pourquoi Britney Spears a-t-elle été placée sous tutelle? Qu’implique ce régime juridique particulier? Quel a été le rôle de son père, Jamie Spears? Où en est la procédure dans laquelle Britney Spears demande à ce qu’il soit écarté de sa vie? Qui sont les soutiens de la chanteuse et ceux qui ont lancé le mouvement #FreeBritney? Le HuffPost répond à ces questions et fait le point sur cette affaire longue de plus d’une décennie alors qu’une nouvelle audience se tient ce mercredi 29 septembre.

Quand et pourquoi Britney Spears a été placée sous tutelle?

Parmi les artistes les plus populaires au début des années 2000 après les succès des albums Baby one more time et Oops i did it again, Britney Spears montre aussi des signes de détresse psychologique à l’image de cette séquence filmée où elle entre dans un salon de coiffure et se rase le crâne en 2007. En février 2008, et suite à deux admissions successives en hôpital psychiatrique, une juge de Los Angeles place la jeune femme sous le “contrôle temporaire” de son père. Une mesure censée assurer la sécurité et les soins d’une personne en danger.

En octobre de la même année, la justice décrète que la tutelle doit s’inscrire dans une “période indéterminée”. “La tutelle est nécessaire et appropriée en raison de la complexité des entités financières et commerciales, et de son état susceptible d’être sous influence”, déclare la juge devant le tribunal. 

Cette tutelle a ”été mise en place lors d’un moment de détresse absolue intense” rappelle le psychiatre Jean-Victor Blanc au HuffPost. ”Ça l’a éloignée d’un environnement toxique, ça lui a permis d’être soignée et de suivre un traitement.” Mais depuis 13 ans, la décision a été incessamment prolongée. Et si “la situation paraissait judicieuse au début”, ce n’est “plus du tout” le cas, juge le médecin.

Qu’implique le régime de tutelle?

Les conditions de ce régime sont très strictes et stipulent que les décisions la concernant sont prises notamment par son père Jamie Spears, avec lequel elle entretient de longue date des relations difficiles, ainsi que par une tutrice professionnelle, Jodi Montgomery. Il confère à ces deux personnes tout le contrôle sur les finances et les biens de l’artiste estimés à 60 millions de dollars. Cela englobe notamment les revenus issus des albums, concerts ou émissions télé générés depuis 2008. 

Lors d’une audience qui s’est déroulée en juin 2021, Britney Spears a aussi assuré être contrainte de garder son stérilet. “Je veux pouvoir me marier et avoir un enfant. On vient de me dire, à l’instant, que sous tutelle, je ne pouvais pas me marier ni avoir un bébé”, a-t-elle affirmé, avant de demander au tribunal la possibilité d’enlever son stérilet. Et d’expliquer également être obligée de prendre des médicaments qui la font se sentir “saoule”.

“En résumé, elle a le statut juridique d’un enfant de 8 ans”, décrit au HuffPost Joachim Ohnona, auteur des ouvrages Britney Spears on stage et Britney Spears: Still iconic sur la star. “Il lui faut un accord parental pour prendre l’avion ou pour faire des achats conséquents. Elle n’a la garde de ses enfants qu’à 30%”.

Où en est l’affaire au tribunal?

Pendant dix ans environ, Britney Spears n’a jamais commenté publiquement ce régime de tutelle. Pourtant une enquête du New York Times publiée en juin 2021 rapporte qu’à plusieurs reprises, la star a fait part à des enquêteurs judiciaires de ses inquiétudes concernant l’emprise de son père.

Ce n’est que récemment que Britney Spears s’est opposée publiquement à sa tutelle lors de témoignages face à la justice ou dans des publications sur les réseaux sociaux. Le mercredi 23 juin, l’Américaine qui fêtera cette année ses 40 ans a livré pour la première fois un plaidoyer explosif devant un tribunal de Los Angeles se disant “déprimée” et “traumatisée” par des dispositions qu’elle a qualifiées d’“abusives”.

“Je veux juste reprendre ma vie, ça fait treize ans et ça suffit”, a lancé la pop star qui s’exprimait, à sa demande, lors d’une audience menée via internet. “Je ne suis pas heureuse, je ne peux pas dormir. Je suis tellement en colère”, affirmant que cette mesure judiciaire comparable à un régime de tutelle lui fait “plus de mal que de bien”.

Et si une précédente requête ayant pour objectif d’écarter Jamie Spears l’an dernier avait été rejetée par la juge Brenda Penny, mi-juillet 2021 un tribunal a autorisé pour la première fois l’interprète de Sometimes à choisir comment elle souhaitait être défendue dans son combat pour faire lever sa tutelle. Son nouvel avocat, Mathew Rosengart, a depuis assuré entreprendre des démarches “agressives et rapides” pour écarter Jamie Spears.

Selon des documents juridiques déposés lundi 26 juillet, Britney Spears a lancé une procédure juridique visant à retirer à son père sa tutelle controversée qui lui confère tout contrôle sur ses finances et à le remplacer par un comptable indépendant. Une nouvelle audience est prévue pour le 29 septembre. 

À un peu plus d’un mois de cette audience, son père a finalement indiqué qu’il avait l’intention de “travailler avec la cour et le nouvel avocat de sa fille pour préparer une transition en douceur vers un nouveau tuteur”. 

D’où vient le mouvement #FreeBritney?

Tout est parti d’un podcast d’humoristes autour de l’Instagram de Britney Spears. En 2017, Tess Barker et Babs Gray, deux comédiennes américaines, sont rapidement intriguées par la mise sous tutelle de la chanteuse et se demandent si tout ça n’est pas Toxic” (“Toxique”, un des tubes de Britney Spears). 

“Et c’est devenu un podcast d’investigation”, décrit Tess Barker à l’AFP. Avec sa comparse, elle plonge alors dans les audiences judiciaires sur la question pour y voir plus clair. En 2019, Britney Spears disparaît des réseaux sociaux et elles reçoivent un message audio alarmant: l’étoile pop a été internée de force dans un établissement psychiatrique. L’informateur se présente comme un ancien membre d’un cabinet travaillant sur cette tutelle. 

Le podcast suivant, intitulé ”#FreeBritney”, devient viral et global. Et le hashtag court toujours, puisqu’il a été relayé un demi-million de fois quand, fin juin, Britney Spears a livré son témoignage explosif. Le slogan est aussi repris sur des pancartes de manifestants pro-Britney devant le tribunal de Los Angeles chargé d’examiner le dossier et lors de rassemblements dans d’autres villes américaines. 

Et de devenir aujourd’hui une vague, au secours d’une mégastar mise sous tutelle, qui mobilise mondialement sur les réseaux sociaux au-delà des fans, d’associations de personnes vulnérables aux défenseurs des droits civiques.  

Qui sont les soutiens de la star?

Si le père de Britney Spears a indiqué, par la voix de son avocat, qu’il ne se retirerait pas volontairement de sa tutelle, “ayant été présent 24 heures sur 24 et 7 jours sur 7 au cours des 13 dernières années” pour sa fille, sa mère Lynne Spears a elle plaidé l’inverse. Selon des documents de justice révélés par Page Six et TMZ, Lynne Spears a demandé à la Cour supérieure de Los Angeles d’”écouter les souhaits de sa fille” et de lui permettre de choisir son propre représentant légal.

Parmi ses nombreux soutiens, la chanteuse peut aussi compter sur des personnalités célèbres. “Donnez à cette femme sa vie d’avant, l’esclavage a été aboli il y a bien longtemps!”, s’est exclamée Madonna sur Instagram, en légende d’une photo d’elle portant un t-shirt sur lequel il est écrit “Britney Spears” en lettres roses. La star a été imitée par Miley Cyrus, Paris Hilton, Rose McGowan ou encore Christina Aguilera.

Après la diffusion du documentaire Framing Britney Spears dans lequel plusieurs témoins affirment que Justin Timberlake s’est servi de sa rupture avec Britney Spears en 2002 pour lancer sa carrière solo, le quadragénaire a présenté ses excuses à son ex-compagne. “Je tiens à ces deux femmes [Britney Spears et Janet Jackson, NDLR], je les respecte, et je sais que je n’ai pas fait ce qu’il aurait fallu. Je suis désolé pour ces moments de ma vie où mes actes ont contribué au problème, où j’ai monopolisé la parole, où je ne me suis pas exprimé au nom de ce qui était juste”, a-t-il écrit.

La Maison blanche a-t-elle réagi à l’affaire?

En février 2021, la diffusion du documentaire Framing Britney Spears, produit par The New York Times, sur la chaîne américaine FX a largement remis l’affaire Britney Spears sous les projecteurs. Avant que l’artiste elle-même ne livre un plaidoyer inédit contre cette “tutelle abusive” devant un tribunal en juin 2021. 

Outre-Atlantique, l’affaire prend désormais tellement d’ampleur que même La Maison blanche a été invitée à réagir lors d’une conférence de presse. Jen Psaki, porte-parole de l’administration Joe Biden, a affirmé que la Maison blanche suivait “de très près” la situation. 

Il faut dire que le “cas” Britney Spears est révélateur d’un système, celui des régimes de tutelle aux États-Unis. À l’heure actuelle, on estime entre un à trois millions le nombre de personnes qui, comme l’interprète de “Toxic, vivent cette situation dont il est difficile, si ce n’est impossible d’en sortir. Sans pour autant qu’il n’existe de loi fédérale permettant de régir les relations entre une personne et son tuteur.

Inspirées par le combat de Britney Spears, deux députées de la chambre américaine (l’une démocrate, l’autre républicaine) ont depuis déposé une proposition de loi visant à mieux encadrer le régime et rendre illégales les “tutelles abusives qui peuvent être un cauchemar sans fin” pour ceux qui en sont victimes.

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