PSYCHOLOGIE - La chaleur accablante a tendance à vous rendre agressif? Pas surprenant. Depuis ce mardi 10 août, le soleil et la chaleur font (enfin) leur retour sur une large partie de la France, et particulièrement dans le sud du pays, où Météo France attend des températures allant jusqu’à 40°C ce mercredi.
Si ces températures estivales sont synonymes de vacances idylliques pour de nombreux aoûtiens, elles peuvent aussi s’avérer particulièrement néfastes pour notre santé mentale.
Jusqu'à 37 °C dans l'intérieur du Var aujourd'hui. La chaleur va encore s'accentuer dans le Sud-Est. Dès demain mercredi, les températures atteindront souvent les 35 à 38°C. On pourra atteindre ou dépasser localement les 40°C dans l'intérieur de la Provence ou la vallée du Rhône. https://t.co/XCnfmZvpEI
— VigiMétéoFrance (@VigiMeteoFrance) August 10, 2021
En 2013, une étude menée par l’université de Berkeley révélait déjà qu’une simple hausse de 1°C par rapport à la normale saisonnière suffisait pour que le nombre de violences personnelles - telles que des crimes, violences domestiques, meurtres, viols - augmente de 4%.
Causes physiologiques
Alors comment expliquer cet état d’agressivité et d’impulsivité en période de fortes chaleurs? “Physiologiquement, quand il fait chaud, notre rythme cardiaque s’accélère, le pouls est plus fort, notre pression artérielle augmente, et notre niveau de cortisol (l’hormone du stress) augmente donc on aura tendance à se sentir plus irritable, mais les réactions varient d’un individu à l’autre et il manque encore d’études poussées sur la question”, rappelle Élodie Gratreau, doctorante en histoire et philosophie des techniques de soin en psychiatrie au sein du laboratoire Costech, contactée pour Le HuffPost.
Le manque d’oxygène accentue également ce sentiment d’irritabilité. En effet, lorsque certaines régions du cerveau commencent à manquer d’oxygène, notre corps envoie plus de sang que d’ordinaire dans le reste de notre corps pour le refroidir. Dans ce cas-là, nous finissons par agir de manière plus impulsive, sous le coup de l’émotion. D’ailleurs, l’un des premiers signes du coup de chaleur, est “l’agressivité inhabituelle”, rappelle l’INPES.
La chaleur exacerbe la fragilité mentale
Après un an et demi de crise sanitaire, la hausse des températures vient aussi exacerber la fragilité mentale des Français. “Dans un temps de confinement, d’incertitude civilisationnelle où l’on ne sait pas à quelle sauce on va être mangé d’un point de vue politique et sanitaire, évidemment que la canicule se vit autrement. Surtout lorsqu’on reste chez soi en télétravail, au bord du burn out”, assure Joseph Agostini, psychologue clinicien contacté par Le HuffPost.
Par ailleurs, ces fortes chaleurs ont davantage tendance à toucher les personnes fragilisées. “L’impact de la canicule touche particulièrement les personnes isolées, vieillissantes, du troisième ou quatrième âge qui se retrouvent dans une solitude et dans un mal-être physique. Il y a chez eux un sentiment de dépression et la peur de mourir qui se manifeste”, poursuit Joseph Agostini.
Outre les personnes âgées, les personnes sous traitements psychologiques peuvent également présenter plus de difficultés à supporter les fortes chaleurs. “Il y a de l’anxiété parce que le corps sent qu’il est en danger vital”, témoigne Élodie Gratreau, atteinte de trouble de la personnalité borderline. “Personnellement, lorsqu’il fait chaud, je peux souffrir de tachycardie après avoir pris des antidépresseurs et des neuroleptiques.”
Mais comme le rappelle Joseph Agostini, la chaleur a pour autre conséquence de creuser encore plus les écarts de mode de vie. “Entre les personnes qui disposent de la climatisation et les familles qui vivent à plusieurs dans les logements sociaux, les conséquences ne seront pas les mêmes.”
L’éco-anxiété
Il existe également le phénomène récent et encore mal connu de l’éco-anxiété. Il s’agit de personnes - la plupart des jeunes entre 18 et 24 ans - qui développent “une peur chronique d’un environnement condamné”, selon la définition de l’Association américaine de psychologie.
En d’autres termes, il s’agit d’une impression d’assister aux conséquences du réchauffement climatique sans pouvoir ne rien y faire. Chez les personnes qui en souffrent, cela entraîne souvent “une souffrance individuelle avec des troubles associés comme des phobies et des angoisses extrêmes”, a expliqué à la RTBF Véronique Lapaige, la psychiatre qui a conceptualisé cette notion d’éco-anxiété.
“Cette année, la canicule vient clairement brandir le spectre des catastrophes climatiques” remarque Joseph Agostini. “Entre les inondations, les catastrophes naturelles à répétition et les pandémies mondiales, la vision de la canicule de 2003 a changé, il n’y a plus de rareté à l’événement, aujourd’hui c’est récurrent”, souligne le psychologue.
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