COVID - J’étais tellement heureuse à l’idée d’avoir 21 ans. Je venais d’obtenir mon diplôme et j’avais prévu de prendre une année sabbatique pour voyager, prendre le temps de me recentrer et définir la carrière de mes rêves.
Mais cet enthousiasme se doublait d’une forte pression. Dans mon cercle d’amis, on s’imaginait que nos 21 ans seraient plus extraordinaires que tous les précédents, riches en expériences et en aventures.
Mon anniversaire était super, là n’est pas la question, mais les mois qui ont suivi n’ont pas été à la hauteur de mes attentes. J’ai passé la première moitié de ma 21e année clouée au lit par d’insupportables douleurs thoraciques, incapable de marcher seule jusqu’aux toilettes. J’ai fait plusieurs séjours de quelques semaines à l’hôpital, souvent en urgence. Tandis que j’étais sous perfusion, à me rétablir, je rêvais d’avoir à nouveau suffisamment de force pour trouver du travail et économiser assez d’argent pour voyager en Australie avec mon copain.
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Étant atteinte de la mucoviscidose, ou fibrose kystique, une maladie chronique qui provoque un encombrement des voies respiratoires et du système digestif par un épais mucus, je sais que mon état va empirer jusqu’à ce que l’un de mes organes soit irrémédiablement endommagé.
Ma maladie a toujours été un fardeau, avec une routine médicale de quatre heures par jour, qui implique un mélange de respirateurs artificiels et d’inhalateurs, d’hospitalisations régulières et de rendez-vous avec des kinésithérapeutes, diététiciens et infirmiers chargés de vérifier chaque aspect de ma maladie.
J’entame la deuxième moitié de ma vie. C’est pourquoi je voulais que ma 22e année soit plus belle que toutes les précédentes.
Ma maladie est très imprévisible et je suis souvent pliée de douleur, alitée et incapable de manger plusieurs jours de suite, sans aucun signe annonciateur. Des infections pulmonaires fréquentes impliquent aussi le recours fréquent aux antibiotiques qui me donnent la nausée, le vertige et m’épuisent.
La mucoviscidose est une maladie létale qui réduit l’espérance de vie à 44 ans, ce qui signifie que j’entame la deuxième moitié de ma vie. C’est pourquoi je voulais que ma 22e année soit plus belle que toutes les précédentes, parce que je ne sais pas combien d’autres grandes étapes j’aurai la chance de fêter.
En mars 2020, j’ai dû me résigner à rentrer chez moi pour me protéger du coronavirus. Ma mucoviscidose me place dans la catégorie des personnes très vulnérables d’un point de vue clinique. J’ai passé des mois dans la peur constante que mes proches ou moi-même attrapions ce virus mortel.
Je dois gérer ma santé seule, assister à des rendez-vous hospitaliers virtuels et faire confiance à mon instinct quand j’ai l’impression d’avoir besoin de plus de médicaments. Pour ma santé mentale, je me concentre sur ce que je peux faire chez moi: prendre l’air tous les jours pour garder le moral, me plonger dans le travail et apprendre à boxer en autodidacte.
Cette période est difficile pour tout le monde, de différentes manières. Je sais que je ne suis pas la seule à regretter ce temps perdu, loin de ceux qu’on aime et ces moments qu’on ne rattrapera jamais. Mais entre ma faible espérance de vie et le rêve déçu de ma génération, qui espérait voir en cette décennie les “années folles” du XXIe siècle, je crains d’avoir perdu ce qui aurait pu être la meilleure année de ma vie.
Je me sens constamment obligée d’accomplir et d’expérimenter un maximum de choses dans le temps qui m’est imparti, comme s’il fallait que je concentre 80 ans de vie en quatre décennies. Pour moi, une année compte davantage que pour d’autres. J’ai une année de moins pour faire des expériences, tant que ma santé me le permettra. Mon temps est compté; en vieillissant, ma santé se dégradera. Pour moi, chaque seconde est importante.
Il est normal d’être frustré par la perte de temps, surtout quand on sait qu’on en a potentiellement moins que d’autres. Même si c’est un cliché, ces douze mois m’ont montré à quel point la vie est imprévisible et appris à profiter de chaque seconde. Même si elle ne s’est pas déroulée comme prévue, mon année 2020 reste importante. J’ai enfin trouvé le courage de confier à mon psy que je souffre de troubles obsessionnels compulsifs, commencé à prendre des médicaments, et consacré du temps à ma santé physique. Je me suis autorisée à ralentir, me reposer et récupérer des forces quand j’étais très mal en point, en 2019. Lorsque la pandémie sera terminée et que j’aurai retrouvé ma liberté, je serai assez forte pour savourer pleinement la vie.
J’ai appris cette année que je devais me mettre moins de pression. Peu importe que je ne sois pas allée en Australie, que j’aie dû annuler des sorties concert et théâtre et que je n’aie pas trouvé le travail de mes rêves. J’ai pu réévaluer ce qui est important et j’oublie l’avenir pour me concentrer sur le moment présent.
De telles aventures pourraient se reproduire un jour. Pour l’instant, je rêve plus petit.
Ce blog, publié sur le HuffPost britannique, a été traduit par M. André pour Fast ForWord.
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