Les parents d'élèves inquiets face à la menace des écoles fermées

Des élèves du collège Françoise Giroud, à Vincennes, le 1er septembre 2020.

ÉDUCATION NATIONALE - À l’heure où la question délicate de la fermeture des écoles se pose de nouveau en France sous la pression d’une nouvelle vague de Covid-19, l’inquiétude monte chez les parents d’élèves.

Si jusqu’ici le gouvernement martelait que la fermeture des établissements scolaires n’était “pas du tout le scénario privilégié”, la petite musique de l’école à la maison se fait pourtant de nouveau entendre dans le débat public. Les indicateurs sanitaires sont au rouge: sur la seule journée du 22 mars, plus de 4000 cas positifs d’élèves et personnels sont remontés au ministère de l’Éducation nationale, indique Franceinfo.

Gabriel Attal, porte-parole du gouvernement, a déclaré mercredi dans le journal régional L’Union ne plus exclure la possibilité de fermer les écoles. Dans cette interview, il réagissait aussi à la proposition de Valérie Pecresse, présidente de la région Île-de-France, d’avancer les vacances scolaires de quelques semaines pour ralentir la circulation du coronavirus. Si cette décision était prise, il y “aurait un impact et des difficultés pour les familles”, selon lui.

Un avis partagé par Gilles Demarquet, président de l’Association de parents d’élèves de l’enseignement libre (Apel), qui pointe auprès du HuffPost la “lourde charge mentale pesant sur les parents dans cette crise”. “On ne se rend pas compte de l’adaptation qu’un avancement des vacances scolaires demanderait aux parents d’élèves”, souligne-t-il. 

Plus largement, pour une majorité de parents d’élèves, la fermeture des écoles n’est pas souhaitée. Seul un quart des Français y est favorable, selon un sondage Elabe pour BFMTV. Entre les difficultés d’adaptation pour les parents et les risques de décrochage pour les élèves -entre 6 et 10% d’entre eux n’ont pas donné de nouvelles à leur enseignant pendant le premier confinement, selon une enquête de la Depp, la division des statistiques du ministère de l’Éducation-, les parents d’élèves redoutent de devoir à nouveau assurer l’école à la maison. “Nous voulons à tout prix que les écoles restent ouvertes”, reprend Gilles Demarquet. “Une fermeture créerait des difficultés scolaires, sociales, une fracture numérique.”

“Fermer les classes, ce serait l’aveu d’un échec, celui d’abandonner les élèves et leurs parents”, renchérit Rodrigo Arenas, coprésident de la Fédération des conseils de parents d’élèves (FCPE), première fédération de parents d’élèves, contacté par Le HuffPost. “Les enfants ne se gardent pas simplement, ils s’éduquent, et c’est à l’école d’en assurer une partie.”

Renforcer les mesures sanitaires

De l’autre côté, face à la hausse des contaminations dans les écoles, des mesures doivent être prises. Envoyer son enfant à l’école en sachant qu’il peut y attraper le Covid-19 constitue également une charge mentale pour les parents. “Ils sont souvent partagés entre d’un côté, la volonté que leurs enfants restent à l’école, et de l’autre, un sentiment qu’il va falloir qu’ils se fassent à une possible fermeture si rien ne change”, explique Gilles Demarquet. 

C’est pourquoi il faut selon lui renforcer le protocole sanitaire pour assurer l’école en présentiel et ainsi rassurer les parents: “il faut réaliser un vrai travail pédagogique auprès des élèves sur ce que sont les gestes barrières qui ne sont pas intégrés partout. Inciter les enfants à la vigilance sans être anxiogène et vacciner à tour de bras les enseignants en leur laissant le choix”.

Autre possibilité: un fonctionnement hybride, déjà appliqué dans certains lycées des 16 départements sous restrictions sanitaires qui ont basculé en “demi-jauge”, c’est à dire qu’une partie des cours sont réalisés en présentiel et l’autre en distanciel. “On pourrait étendre ce fonctionnement aux collèges”, note Gilles Demarquet. 

Renforcer les mesures sanitaires, c’est aussi ce que préconise Rodrigo Arenas de la FCPE, pour qui le problème ne se noue pas autour de la question de la fermeture des classes, mais plutôt autour de “l’absence de mesures efficaces et de moyens”. Lui préconise donc d’investir urgemment dans l’Éducation nationale et d’équiper les enseignants pour leur permettre de respecter les protocoles sanitaires: “Jean-Michel Blanquer a rendu 200 millions d’euros à Bercy du budget prévu pour l’Éducation nationale au lieu de créer des postes”, dénonce Rodrigo Arenas. “Si les professeurs ne peuvent pas être remplacés, les élèves s’entassent dans les classes, ce qui rend impossible la distanciation physique.”

Par ailleurs, les masques devraient être gratuits selon lui, pour éviter que “certaines familles s’équipent sur Amazon ou sur le marché avec un matériel non conforme”. Et de s’interroger: “pourquoi ne pas utiliser les tiers-lieux (espaces libres pouvant accueillir écoles et professeurs, comme le CDI, les couloirs, la cour de récréation, NDLR) pour optimiser l’espace, freiner les contaminations et éviter la fermeture?”.

Comme Rodrigo Arenas, Patrick Salaün, président de l’Union Nationale des Associations Autonomes de Parents d’Élèves (UNAAPE), estime que les parents d’élèves sont aujourd’hui dans l’incertitude en raison de mesures trop floues. “Ils en ont ras-le-bol de vivre à la petite semaine, d’injonctions contradictoires, de manque de mesures claires”, énumère-t-il, interrogé par Le HuffPost. Pour lui d’ailleurs, un confinement et une fermeture temporaire des écoles serait préférable aux mesures actuelles, “dénuées de sens” estime-t-il. 

Patrick Salaün recommande la fermeture des classes de tous les établissements scolaires des trois zones géographiques pendant quatre semaines. Le but: éviter à tout prix une fermeture prolongée des écoles. “Ce serait pendant les vacances scolaires, donc ce n’est pas si difficile à accepter”, souligne-t-il. “Il faudrait tout de même assurer une certaine continuité pédagogique pendant cette période”. Une fermeture qui laisserait le temps aux enseignants volontaires de se faire vacciner. “Ce qu’il faut, c’est une date de début, une date de fin, plutôt que des mesures arbitraires qui laissent aujourd’hui les parents dans l’incompréhension”, conclut-il.

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