ESPACE - C’est un locataire pas comme les autres. Le blob, un organisme ni animaux, ni plantes, ni champignons va rejoindre la Station spatiale internationale (ISS) ce mardi 10 août pour faire l’objet d’une expérience éducative orchestrée par Thomas Pesquet.
Depuis la Terre, à l’automne, plusieurs centaines de milliers d’élèves, du CE2 à la terminale, reproduiront l’expérimentation sur cette curieuse espèce vivante inclassable, sous l’égide du Centre national d’études spatiales (Cnes), en partenariat avec le CNRS.
Le “Physarum polycephalum” n’est composé que d’une seule cellule et de plusieurs noyaux. Semblable à une masse spongieuse de couleur jaune, il est dépourvu de bouche, de pattes et de cerveau. Et pourtant, il mange, grandit, se déplace (très lentement), et possède d’étonnantes capacités d’apprentissage.
La créature peut aussi se diviser à volonté et se mettre en dormance (sans mourir) en se déshydratant: c’est dans cet état, dit de “sclérote”, que plusieurs morceaux de blob vont faire leur baptême de l’espace, à bord d’un cargo de ravitaillement de la Station spatiale internationale.
Lorsque l’astronaute les réhydratera, en septembre, quatre sclérotes d’environ 0,5 cm se réveilleront à 400 km de la Terre, dans des boîtes de Pétri, pour y subir deux protocoles: l’un testera l’attitude de blobs privés de nourriture, l’autre fournira aux plus chanceux une source alimentaire - des flocons d’avoine.
Un ovni dans l’espace et dans les classes
Le blob est un ovni pour les scientifiques, un “objet vivant non identifié”. Le but est d’observer les effets de l’apesanteur sur cet organisme. “Aujourd’hui, personne ne sait quel comportement il va avoir en microgravité: dans quel sens va-t-il se déplacer, est-ce qu’il va prendre la troisième dimension en allant vers le haut, ou vers l’oblique?”, s’interroge Pierre Ferrand, professeur de sciences et vie de la Terre détaché au Cnes, l’un des initiateurs du projet.
Au sol, des milliers de spécimens de blob, découpés sur la même souche (LU352) que celle de leurs congénères spatiaux, seront distribués à 4500 écoles, collèges et lycées de France.
Les établissements se sont bousculés pour répondre à l’appel à projet. “Au départ, on avait prévu de fournir 2000 classes. Mais face à la déferlante d’inscriptions, le Cnes et le CNRS ont fait un effort financier pour satisfaire les 4500 demandes”, raconte Christine Correcher, responsable des projets éducatifs à l’agence spatiale.
Fin août-début septembre, les enseignants recevront un kit contenant entre 3 et 5 sclérotes préparé par l’équipe d’Audrey Dussutour, assorti d’un tutoriel pour conduire l’expérience.
😱 La pression est à son comble, c'est aujourd'hui que nos blobs décollent !
— Audrey Dussutour (@Docteur_Drey) August 10, 2021
🛰️ May the force be with you Blobi Wan Kenobi 💛
📸 NASA#blob#ISS#NASA#elevetonblob. pic.twitter.com/kfVRct9JzL
Quand là-haut, Thomas Pesquet humidifiera ses blobs, les élèves feront de même en classe. Démarreront ensuite des séances de prise de vue, pour pouvoir comparer son comportement avec ou sans gravité.
Parce qu’il bouscule certaines théories scientifiques, le blob devrait susciter de nombreuses discussions dans les classes. “Par exemple dans la théorie cellulaire, l’une des plus anciennes, on dit que toute cellule se divise en deux cellules. Avec le blob, ça ne marche pas, puisque c’est une cellule unique qui croît sans jamais se diviser”, explique Pierre Ferrand.
Autre bizarrerie biologique: “Quand la plupart des organismes utilisent deux types sexuels, le blob, lui, en a plus de 720 ! C’est un organisme à tiroirs qui nous dit que la vie est faite d’une multitude d’originalités”, selon ce professeur.
Le blob est apparu sur Terre il y a plus 500 millions d’années, avant les animaux. Il fut longtemps considéré comme un champignon, avant d’être évincé de ce règne pour rejoindre, dans les années 1990, le groupe des amibozoaires, dont les amibes font partie.
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