Une suite à Goldorak en BD: le retour du Prince d’Euphor

L’album demandera au total quatre ans de travail à l’équipe, ce qui se voit à la lecture. Le dessin reste fidèle à l’univers de Go Nagai mais se veut beaucoup plus contemporain et bien plus précis, notamment dans les spectaculaires scènes d’action qui fourmillent de détails.

BANDE DESSINÉE - Toute une génération, celle des enfants de la fin des années 1970 et du début des années 1980, a vibré sur la musique du générique du dessin animé. À cette époque où n’existaient que trois chaînes de télévision, les programmes à destination de la jeunesse étaient rares et la culture japonaise encore mystérieuse. Apparu sur Antenne 2 au milieu de l’été 1978, Goldorak a déchaîné les passions au point d’être prolongé après la rentrée scolaire, ce qui n’était pas prévu. Le personnage devient rapidement la star des cours de récré, ouvre les Français à l’esthétique manga et inspire une avalanche de produits dérivés (4,5 millions de 45 tours de la musique du dessin animé sont alors vendus, sans parler des jouets et des partenariats publicitaires).

Pour tous ces grands enfants, aujourd’hui quarantenaires, une évidence s’installe en tournant les pages d’un nouvel album BD ressuscitant le robot de l’espace, sobrement intitulé “Goldorak”: les batailles avec les Golgoths nous ont manquées! L’impression est curieuse: tout en ayant l’impression de replonger instantanément dans l’univers de notre enfance, impossible de ne pas être surpris par l’ambition visuelle, la direction artistique audacieuse mêlant influences européennes et japonaises et le caractère très sombre de cette nouvelle histoire dans laquelle comme nous, les personnages ont vieilli. La BD démarre quarante ans après le dernier épisode, comme à la suite d’une longue parenthèse. L’Empire de Véga est de retour sur Terre et ambitionne d’annexer le Japon. Le robot géant, caché tout ce temps près du Ranch du bouleau blanc, n’a pas quitté notre planète. Les enfants du dessin animé ont grandi, et les auteurs de la BD ambitionnent logiquement de transposer l’univers de Goldorak dans une histoire destinée aux adultes, puisque c’est aux anciens fans qu’ils choisissent de s’adresser.

Une œuvre signée à dix mains

C’est lors d’un déjeuner il y a cinq ans avec la directrice éditoriale de Kana (une maison d’édition de manga) que le scénariste Xavier Dorison avoue rêver de donner une suite à Goldorak. L’éditrice, qui connaît personnellement Go Nagai -l’auteur du manga original et du dessin animé- s’engage à lui transmettre un projet lors de son prochain voyage au Japon. Contre toute attente, Go Nagai accepte et valide rapidement un synopsis accompagné d’une quinzaine de planches, tout en s’engageant à laisser une grande liberté créative aux Français.

Xavier Dorison engage sur le projet le dessinateur Denis Bajram, tout aussi fan que lui, qui partage à son tour l’idée avec trois copains de son atelier: Alexis Sentenac, Brice Cossu et Yoann Guillo. C’est ainsi que le projet est développé par cinq auteurs avec une méthode unique: au lieu de se répartir les tâches, chacun (hormis le coloriste) participe au travail des autres, avec des allers-retours incessants sur le scénario, le découpage des planches, les dialogues et le dessin. La plupart des images sont ainsi composées à dix mains, l’un travaillant le décor, l’autre les personnages, un troisième redessinant les mains ou les visages. “Ce qui explique qu’on a passé plus de temps sur cet album que sur nos albums respectifs, c’est le fait de constamment repasser les uns derrière les autres et de discuter. En comptant le storyboard et l’encrage, on peut monter jusqu’à huit versions différentes de chaque page, pour un album de 120 pages”, explique Brice Cossu, rencontré il y a quelques mois alors que le travail n’était pas terminé.

L’album demandera au total quatre ans de travail à l’équipe, ce qui se voit à la lecture. Le dessin reste fidèle à l’univers de Go Nagai, mais se veut beaucoup plus contemporain et bien plus précis, notamment dans les spectaculaires scènes d’action qui fourmillent de détails. Miraculeusement, les auteurs ne semblent pas écrasés par la déférence due à l’auteur ni par l’émotion de devoir imaginer une nouvelle conclusion aux aventures des héros de leur enfance. Leur histoire prolonge un rêve un peu lointain avec la bonne distance et la passion nécessaire. L’album n’aura pas de suite, on aurait pourtant bien aimé revenir au ranch une fois de plus.

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