La cystite, une infection bénigne, mais toujours un "cauchemar féminin"

Une femme sur deux connaîtra au cours de sa vie au moins un épisode de cystite. Sur ces femmes, 20% environ vont faire une récidive et 30% d’entre elles feront encore un autre épisode. Pourtant à ce jour, la recherche est encore loin d’être au point <a href=sur cette pathologie qui a longtemps été invisible dans l’histoire de la santé. De même que sa prise en charge par le corps médical qui est encore tâtonnante. " data-caption="Une femme sur deux connaîtra au cours de sa vie au moins un épisode de cystite. Sur ces femmes, 20% environ vont faire une récidive et 30% d’entre elles feront encore un autre épisode. Pourtant à ce jour, la recherche est encore loin d’être au point sur cette pathologie qui a longtemps été invisible dans l’histoire de la santé. De même que sa prise en charge par le corps médical qui est encore tâtonnante. " data-rich-caption="Une femme sur deux connaîtra au cours de sa vie au moins un épisode de cystite. Sur ces femmes, 20% environ vont faire une récidive et 30% d’entre elles feront encore un autre épisode. Pourtant à ce jour, la recherche est encore loin d’être au point sur cette pathologie qui a longtemps été invisible dans l’histoire de la santé. De même que sa prise en charge par le corps médical qui est encore tâtonnante. " data-credit="AJ_Watt via Getty Images" data-credit-link-back="" />

SANTÉ - Vous avez peut-être déjà ressenti sa brûlure cuisante, son inconfort lancinant, à tel point qu’aller uriner devient un cauchemar et que votre qualité de vie en est altérée: la cystite.

Une femme sur deux connaîtra au cours de sa vie au moins un épisode de cystite. Sur ces femmes, 20% environ vont faire une récidive et 30% d’entre elles feront encore un autre épisode. Pourtant à ce jour, la recherche est encore loin d’être au point sur cette pathologie qui a longtemps été invisible dans l’histoire de la santé. De même que sa prise en charge par le corps médical qui est encore tâtonnante. 

Le Dr Jean-Marc Bohbot, infectiologue et andrologue à l’institut Fournier, et la journaliste santé Rica Etienne se sont penchés sur cette maladie qui “pourrit la vie des femmes”, notamment en été. Ensemble, ils nous expliquent pourquoi la cystite reste encore aujourd’hui un “cauchemar féminin” selon le titre de leur livre paru chez Flammarion en avril 2021. 

Vous écrivez dans votre livre que la vessie a longtemps été une histoire d’homme, et celle de la femme alors? 

Rica Étienne: “Il s’avère qu’historiquement on s’est très peu intéressé à la vessie de la femme et ses pathologies, dont la cystite. Nous avons fait des recherches historiques et on n’a rien trouvé à ce niveau-là sur les femmes.

On s’étend sur les coliques néphrétiques de Montaigne, on parle des soucis d’urètre et de rétention d’urine d’Henri IV, des problèmes urinaires et prostatiques de Napoléon, mais pas un seul article sur les problèmes urinaires des femmes. Même les tablettes mésopotamiennes ne font pas mieux et ne traitent que des urines masculines. Le seul moment où les urines de femme entrent dans la lumière c’est en tant que traitement magique pour les hommes, au temps où l’on pensait que les urines de femmes enceintes possédaient le pouvoir de rendre les hommes fertiles.

D’ailleurs on a toujours été meilleurs en anatomie masculine que féminine. Vous vous rendez compte, il a fallu attendre 1998 pour connaître la constitution complète du clitoris. On était déjà allé sur la Lune depuis des décennies, mais on ne connaissait pas encore l’organisation en 3D du clitoris!

Jean-Marc Bohbot: C’est un réel décalage qui peut être en partie expliqué  par le fait que l’homme a un sexe à l’extérieur, visible, alors que la femme a des organes génitaux imbriqués, cachés. Encore aujourd’hui cette méconnaissance persiste chez une partie de la population.

C’est à dire?

Jean-Marc Bohbot: Beaucoup de femmes ignorent leur anatomie. Parfois cela vient du fait que c’est tabou dans leur famille et leur entourage. Elles sont maintenues dans le flou toute leur vie. Ces femmes ont du mal à aller voir un médecin pour parler de sujets intimes, c’est un vrai tabou. Et pour elles, c’est également une vraie fatalité. Certaines voient leurs mères, grands-mères, leurs sœurs, souffrir de maux intimes, et ne rien faire. Alors elles-mêmes supportent leur propre souffrance en se disant que c’est la condition féminine qui veut ça, elles abandonnent. Il suffirait d’éduquer les petites filles pour qu’elles aient plus tard la conscience de leur corps et soient capables d’en parler. Qu’elles comprennent que la condition féminine n’est pas une fatalité.

Et sur le “cauchemar féminin” qu’est la cystite, la médecine avance-t-elle aujourd’hui? 

Jean-Marc Bohbot: À ce jour les connaissances sur la vessie et la cystites sont encore très récentes. Celles sur le microbiote [ensemble des micro-organismes vivant dans un écosystème comme la vessie, le vagin ou les intestin, Ndlr] datent d’il y a cinq ans, c’est très court. Il faut donc du temps pour que tout le monde soit à jour sur ces nouvelles données. Encore récemment on ignorait que le microbiote de la vessie était lié à celui du vagin et de l’intestin, par exemple.  
Pour ce qui est des traitements, les laboratoires s’intéressent à des solutions alternatives aux antibiotiques, naturelles à base de plantes ou de probiotiques, mais beaucoup de médecins ne sont pas encore bien informés sur ce que les labos mettent au point.

Certaines femmes peuvent mettre des années à trouver le traitement adéquat pour stopper leurs cystites qui récidives. Pourquoi tant de mal à trouver un remède? 

Jean-Marc Bohbot: Tout le personnel médical n’a pas encore la formation adéquat pour prendre en charge les femmes atteintes de cystites, en particulier les récidivantes [on dit qu’elles sont récidivantes quand elles surviennent plus de quatre fois en un an, Ndlr]. Il faut savoir poser les bonnes questions pour trouver l’origine du mal. 

Rica Étienne: Aussi, le fait est que poser un diagnostic prend du temps et les médecins ne l’ont pas. Pour déterminer la cause d’une cystite, il faut creuser en amont. Parfois celle-ci se niche dans un déséquilibre de la flore vaginale, intestinale ou encore dépend d’un facteur psychologie comme le stress ou un traumatisme. Et pour trouver cela, il faut du temps. Un consultation devrait durer une heure, une heure et demi, pour bien échanger avec la patiente. Mais dans les conditions actuelles ce n’est pas possible. Aujourd’hui, en général, un médecin enchaine les patients, il ne peut pas se permettre de passer trop de temps sur l’un d’eux. Ça coûte de l’argent. Ainsi, soigner une cystite avec un antibiotique semble la solution la plus simple et la plus efficace à court terme. Mais sur le long terme elle reviendra, il y aura récidive.

Jean-Marc Bohbot: Cela dit, une consultation pourrait durer moins longtemps. Si les médecins étaient formés, ils seraient capables de poser les bonnes questions, et il y en a une dizaine, en moins d’une heure. Avec celles-ci, on peut déjà se faire une idée et avoir une piste de réflexion, se dire qu’il faut agir sur tel ou tel microbiote ou modifier une habitude alimentaire par exemple.

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